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Compte-rendu | Myelin : L’intelligence artificielle pour faciliter le transfert des connaissances

Avec l’augmentation exponentielle régulière du nombre d’articles scientifiques publiés chaque jour il est devenu impossible de pouvoir se maintenir à jour sur toutes les dernières connaissances. Ce problème est d’autant plus important dans le domaine de la santé mentale ou il existe encore peu de littérature de synthèse (ex. : méta-analyse) et où les recherches sont d’une qualité très variable.

Pour résoudre ces défis, Myelin développe une intelligence artificielle qui a spécifiquement comme but de soutenir le transfert de connaissances (cf. la conférence Tedx à ce sujet).

Myelin s’est particulièrement spécialisée dans la combinaison de la puissance des technologies d’IA de nouvelle génération avec le modèle robuste et logique des ontologies afin d’apporter des informations rigoureuses, pertinentes et personnalisées à tous ceux qui ont des questions ou des difficultés de santé mentale.

Un premier prototype en autisme a été lancé fin 2017. Consultez la vidéo de présentation ou testez le prototype sur www.myelin.solutions.
Conférencier : Marc-Olivier Schüle, doctorant à l’École de psychoéducation, Université de Montréal

Date : 18 janvier 2018
Lieu : Pavillon Saint-Denis (AB), local AB-8015
Horaire : 12h30 à 13h45

Photo : https://www.myelin.ca 


Compte rendu

Une abondance de connaissances est produite à propos de la santé mentale. Toutefois, comme c’est le cas dans plusieurs domaines, la majorité des résultats de recherches ne parvient pas aux milieux de pratiques / intervenants. M. Schüle indique que seulement 18% des intervenants indiquent utiliser souvent les données probantes afin de guider leurs pratiques [i]. Sur internet, 80 % des informations qui circulent à propos de l’autisme sont erronés [ii], et ce, même relativement à des informations de base. Il remarque que les familles d’enfants ayant obtenu un diagnostic d’autisme se tournent vers Facebook pour s’informer. Malheureusement, il y circule énormément de fausses nouvelles et, pire encore, on y remarque la présence d’entreprises qui ciblent spécifiquement ces parents pour vendre toutes sortes de thérapies pouvant même s’avérer dangereuses. M. Schüle signale que 70 % des personnes atteintes d’un problème de santé mentale ne reçoivent pas un traitement adapté à leurs besoins [iii] et 86 % de la recherche qui est réalisée dans ce domaine demeure inutilisée[iv].

Plusieurs raisons permettent d’éclairer cette réalité, dont le fait de la surabondance d’information. M. Schüle mentionne qu’il existe un retard estimé à 17 ans entre la production des connaissances et leur utilisation dans notre réseau de santé et de services sociaux [v].

L’objectif du projet Myelin est de faire passer de 17 ans à 4 minutes le temps entre la publication des résultats et l’utilisation de ceux-ci à l’aide de l’intelligence artificielle. Celle-ci serait utilisée afin d’extraire l’information des articles, d’en évaluer la qualité, d’en comprendre l’information présentée, d’individualiser les réponses, et ce, tout en apprenant pour demeurer à jour. Il s’agit de combiner les connaissances scientifiques avec les informations spécifiques des individus pour fournir des informations rigoureuses, accessibles et personnalisées, afin de permettre à la fois des prises de décisions sûres et efficaces et un meilleur suivi des interventions.

Le prototype, Myelin, développé autour de l’autisme, a créé un énorme engouement. Le lancement a bénéficié d’une couverture médiatique importante et plusieurs organisations venant en aide aux personnes ayant un TSA ont signifié leur intérêt et signaler à quel point cela répondait à un besoin.

C’est grâce à la mise sur pied d’une équipe multidisciplinaire que le prototype a pu être lancé et plusieurs comités se mettent en place autour de différents aspects pour en poursuivre le développement.


Comment ça marche ?
 

Les ressources premières pour la réalisation du projet sont les documents issus de différentes bases de données (PsycINFO, Medline, PubMed).

Première étape : connaître de quel type d’article il s’agit. Pour l’instant, seuls les guides de pratiques, les méta-analyses et les revues systématiques sont conservés.

Deuxième étape : Une grille d’évaluation est appliquée pour juger de la qualité (avec certaines difficultés).

Troisième étape : Extraire l’information. Il existe déjà des programmes qui font ce genre d’opération et qui permettent de démontrer des liens entre différents concepts. Toutefois, la nature de ces liens demeure inconnue.

Quatrième étape : Il est donc nécessaire de créer des ontologies (réseaux de concepts), c’est-à-dire de tisser les liens entre les très nombreux concepts en plus d’introduire les variables de modération entre ceux-ci.

Cinquième étape : Établir des règles de traitement de l’information. Ils ont d’abord mis en place des règles à propos de la qualité des interventions proposées.

Finalement, des textes doivent être produits afin d’adapter l’information et des interfaces doivent être créées pour rendre l’information accessible et utile aux utilisateurs


Quelques sujets abordés durant la période de questions


Comment répondre adéquatement aux personnes atteintes de TSA, sachant que ce trouble se manifeste de manière très différente d’un individu à l’autre ?

Il y a une multitude de facteurs qui influencent l’efficacité d’une intervention. Par exemple un facteur étudié est le sexe de l’enfant : est-ce qu’une intervention fonctionne mieux auprès des garçons ou des filles. L’objectif est de trouver des informations fiables sur les différents facteurs influençant les interventions. Il sera ainsi possible de rassembler l’information sur une plus grande diversité de cas permettant de passer de réponses qui s’adressent à un groupe plus large à des réponses plus personnalisées.


Quelle part prendra l’intervention humaine et comment s’assurer de la qualité du contenu de l’information fournie à l’utilisateur ?
 

Pour l’instant, les informations qui sont générées par notre outil sont très abstraites et ont besoin d’être adaptées pour l’utilisation. Ce sont des étudiants qui travaillent dans ces domaines qui rédigent les textes finaux. L’objectif est toutefois qu’il y ait une rédaction automatique du texte et que des comités soient mis sur pied, entre autres, pour encadrer les résultats générés.


Qui sont les principaux utilisateurs et comment adapter le contenu pour ceux-ci ?

La plus grande part des personnes qui s’intéressent à l’outil pour l’instant sont des proches aidants. Toutefois, nous avons pensé l’outil pour répondre aux proches aidants et aux intervenants, mais on ne s’adresse pas à eux de la même façon. Il va d’abord y avoir plus d’une version pour chaque texte produit et à court terme il y aurait deux niveaux de complexité des textes. Il y aurait éventuellement aussi des versions dans d’autres langues en plus de rendre accessible à toute la population, c’est donc dire par exemple aussi aux gens avec des limitations visuelles. Alors, il faut arriver à avoir pour chaque texte des versions différentes et qu’à long terme ce soit géré automatiquement. Pour ce faire, il y aura un travail à faire avec les partenaires pour s’assurer que les textes sont accessibles aux publics auxquels chacun s’adresse. Ultimement, si la technologie le permettait la machine pourrait transmettre l’information en audio ou en vidéo ce qui permettrait de rendre encore plus accessible l’information.


Comment fonctionnez-vous avec l’accès aux ressources documentaires, sont-elles toutes publiques ?

 Myelin utilise différents documents et bases de données comme source d’information. Les guides de pratiques sont pour la plupart tous publics, ainsi que les sources de méta analyses, toutefois, il y a plusieurs bases de données qui elles sont privées, comme PsycINFo. Il faudra alors fonctionner avec des collaborations. Une autre des limites des machines c’est qu’elles sont conçues pour travailler seulement avec la langue anglaise, alors elle ne peut pas traiter l’information dans d’autres langues.


Comment est-il possible d’accéder à l’information sur Myelin, peut-on écrire une question ?

Pour l’instant la machine fonctionne avec des questions fermées, puisqu’il n’est pas encore possible de s’assurer de la fiabilité de la machine pour bien comprendre une question. Une personne de l’équipe de Myelin s’intéresse à cet aspect et à long terme on espère que les échanges avec la machine ressembleront davantage à une conversation avec les utilisateurs.


La confiance envers les experts a été ébranlée depuis un certain temps. Comment pensez-vous obtenir la confiance des utilisateurs de Myelin ?

C’est une des grandes préoccupations de l’équipe qui travaille au projet. Nous croyons que la réponse est dans la transparence, c’est-à-dire, qu’il faut pouvoir fournir une réponse à l’utilisateur tout en lui expliquant ce qui fait que c’est cette réponse qui lui est formulée. Il faut alors pouvoir retracer ce qui a généré la réponse.

 

[i] Chagnon, F., Pouliot, L., Malo, C., Gervais, M.-J. et Pigeon, M.-È. (2010). Comparison of determinants of research knowledge utilization by practitioners and administrators in the field of child and family social services. Implementation Science, 5, 41. doi:10.1186/1748-5908-5-41

[ii] Characteristics and Quality of Autism Websites. (s. d.). Consulté 18 juillet 2017.  https://www.asatonline.org/research-treatment/research-synopses/characteristics-and-quality-of-autism-websites/

[iii] Lost in Knowledge Translation : Time for a Map ?. Consulté le 18 juillet 2017.  https://www.mcgill.ca/mqhrg/files/mqhrg/graham_2006_lost_in_knowledge_translation.pdf

[iV] Ammerman, A., Smith, T. W., & Calancie, L. (2014). Practice-based evidence in public health: improving reach, relevance, and results. Annual review of public health35, 47-63.
https://doi.org/10.1146/annurev-publhealth-032013-182458

[V] Idem

 

Vous trouverez ci-dessous les diapositives de la présentation. 

 

Vous trouverez ci-dessous la vidéo de la présentation 

 

À propos Élise Ducharme

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